En temps de guerre, la résistance s’organise (4) (envoyé par Marianne Azario – suite aux chroniques 1, 2 & 3)

Bonheur à l’improviste… (extrait envoyé par Mano, tiré de « Permis C » de Joseph Incardona)

Nous avons souhaité une vie prodigieuse
Où les corps se penchaient comme des fleurs écloses
Nous avons tout raté: fin de partie morose;
Je ramasse les débris d’une main trop nerveuse.
                                            Michel Houellebecq
(envoyé par lc.archi le 12/04/2020)

Un rêve

Sous ma langue, la dragée grise fond. À force d’avoir été sucée, il ne reste que l’amande délavée. Le goût de crème s’est envolé. Comme s’est envolé le temps de l’enfance qui prend si peu de temps et qui pourtant compte double. Le temps « Vie de château » avant l’orage qui électrise la grappe des fils à linge.
C’est l’été. Au bord d’un lac, une petite fille. Son visage se trouble quand l’orage claque en rafales les arbres torsadés. À cause de l’orage, elle n’entend pas le feulement du train aux wagons bondés qui traverse les forêts claquemurées. C’est à peine si elle voie son trait noir qui coupe les sapinières tout droit.
Dans mes naseaux, une odeur de souffre et de brûlots, une odeur d’incendie subi qui épouvante les escarbilles. Temps de guerre, temps soleil.
C’est l’été. Après une journée trop chaude, les flammes grimpent sur les roches et dispersent la fumée des ronciers. Une étrange cheminée fulmine. L’enfant se frotte le nez.
Sous mes pieds, l’eau dessine ses ronds de fées. Mon image vacille. Je me sens orpheline. Alors je saute plein de fois dans la flaque pour multiplier ces cerceaux.
C’est l’été. La fillette plonge ses bras blancs dans le bassin d’une fontaine. Les pollens ressemblent à de petites bêtes qui nagent comme des petits pois. Les poissons rouges, eux, n’apprécient pas : ils cherchent leur air.

Mon rêve tourne comme un lion dans un manège en cage. Mon souffle s’affole, le temps me happe. Je fais des moulins avec mes doigts pour disperser tous les nuages et faire venir le ciel bleu. J’ensauvage mes souvenirs, je plonge mes yeux dans l’humus. Je suis sûre d’y lire l’avenir.

(envoyé par Véronique Pédréro, le 10/04/2020)

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